Impacts du changement climatique (ressources en eau et forçages)

MODÉLISATION DES RESSOURCES EN EAU SOUMISES À DES CHANGEMENTS GLOBAUX – Contact : Nicolas Flipo

 

La gestion durable des anthropo-hydro-écosystèmes s’inscrit dans un cadre systémique intégrant les demandes en eau, en nourriture et en énergie. Elle sera sous-tendue dans le futur par notre capacité à anticiper les effets du changement climatique, l’évolution des demandes, et les nouveaux systèmes de gouvernance relatifs à la gestion des milieux anthropisés. Afin de développer des solutions pour répondre à ces questions majeures, l’équipe Systèmes Hydrologiques et Réservoirs du Centre de Géosciences développe des outils numériques dédiés à la modélisation du cycle de l’eau et à la gestion durable de la ressource, à la fois en quantité et en qualité, dans un contexte de changements globaux.

L’équipe développe et maintient un ensemble d’outils de simulation des transferts couplés d’eau, de masse et d’énergie dans les nappes et les rivières. Ces outils se basent sur des librairies de calcul sous forme de briques élémentaires favorisant flexibilité et utilisation des nouvelles technologies des machines et clusters informatiques comme le multi-threading. Les deux outils phare sont CaWaQS, modèle hydrologique-hydrogéologique à l’échelle des bassins versants, et ProSe-P, modèle hydro-biogéochimique des rivières.

 

 

Le bassin de la Seine : une application phare

L’équipe est très investie dans le programme de recherche PIREN Seine (www.piren-seine.fr) dont elle assure depuis 2015 la direction scientifique. Ce programme dédié à l’étude du devenir de l’eau, et des milieux aquatiques du bassin de la Seine pose la question du développement durable du bassin. À cet effet, les outils CaWaQS et ProSe-P occupent une place centrale d

ans les réflexions menées au sein de ce programme emblématique des infrastructures de recherche nationales portées par le CNRS : IR Zones Ateliers et OZCAR.

Ainsi, l’impact des prélèvements d’eau souterraine sur la contribution des aquifères au débit de 14 000 km de rivières du bassin de la Seine a été quantifié avec une résolution spatiale kilométrique, et temporelle journalière. Cette simulation unique, intégrant les échanges nappe-rivière fournit un moyen d’étude et de gestion du bassin sous extrêmes climatiques, et permet de quantifier l’impact des pompages sur la répartition des espèces piscicoles (collaboration Irstea).

À des fins prospectives et face au défi posé par l’évolution du climat, une modélisation couplée hydrogéologie-agriculture mobilisant les outils de l’équipe SHR, et le logiciel STICS de l’INRA (simulation de la croissance des cultures) a été menée. Ses principaux résultats sont la quantification de l’évolution probable de la ressource en eau et l’évaluation des contaminations nitriques par les pratiques agricoles des grands aquifères du bassin Seine-Normandie. Le modèle a aussi une vocation d’aide aux décideurs : quantification de la ressource en eau disponible pour le développement de l’irrigation, en fonction de stratégies d’agriculture et sous contrainte d’évolution climatique.

Des codes de recherche en évolution permanente pour répondre aux questionnements sociétaux

La gestion durable des grands bassins versants passera, dans le futur, par une analyse couplée des systèmes hydrologiques, des systèmes agro-alimentaires et de production d’énergie dans un cadre dialectique global-territoire. Il s’agit donc de développer la simulation des transferts d’énergie et de matières au sein de tous les compartiments de l’hydrosy

stème en relation avec l’évolution de la demande sociale. Une collaboration est ainsi engagée avec l’IPSL afin de coupler l’outil CaWaQS avec un modèle d’échange d’énergie entre l’atmosphère, la végétation et le sol. L’étude du système agro-alimentaire se poursuit également en collaboration avec l’UMR 7619 METIS dans le cadre du PIREN Seine. Ces outils permettront d’établir des trajectoires des systèmes soumis à différents scénarios de gouvernances territoriales et d’évolution du climat.

La conceptualisation des modèles et leur crédibilité reposent, d’une part, sur l’analyse des données, et d’autre part, sur la caractérisation des incertitudes de modélisation. Une méthodologie d’analyse des signaux hydrologiques est ainsi en cours de développement en se basant sur une analyse dans le domaine fréquentiel. De plus, l’assimilation des données de capteurs en continu in situ avec ProSe-P permet d’estimer l’évolution temporelle des propriétés physiologiques des micro-organismes présents dans le fleuve pour affiner la gestion des infrastructures d’assainissement. Ces travaux ouvrent la voie au développement de l’hydrologie stochastique afin d’améliorer la quantification des incertitudes de modélisation indispensable aujourd’hui pour l’aide à la prise de décisions.

Enfin, parmi les grandes évolutions des outils de gestion de la ressource en eau figure l’exploitation des données satellitaires. L’analyse du potentiel des données issues de l’altimétrie spatiale dans le cadre de la future mission SWOT (Surface Water Ocean Topography, mission conjointe NASA, CNES, avec la participation de UKSA et CSA) a montré qu’il sera possible d’exploiter les estimations distribuées de débit fournies par la mission pour déterminer la contribution des aquifères aux débits des rivières. Ces données permettront également de mieux comprendre les interactions entre les fleuves et leur nappe d’eau souterraine d’accompagnement localisée dans les grandes plaines alluviales, siège de l’expansion des grandes métropoles.