Thèse Antoine COLLET

Le 19 décembre 2024

L’optimisation des applications souterraines se traduit généralement en un problème d’estimation de paramètres, c’est-à-dire un problème inverse résolu numériquement. Les méthodes d’optimisation déterministes, construites sur le gradient, sont essentielles pour résoudre ces problèmes. Cependant, l’approche « facile » pour estimer le gradient (c’est-à-dire par différences finies) n’est pas applicable pour les modèles de grande dimension : le coût de l’approximation numérique du gradient augmente linéairement avec le nombre de paramètres à ajuster. La méthode de l’état adjoint est une approche bien connue pour surmonter ce problème et a été appliquée à un large éventail de disciplines telles que l’estimation de paramètres en hydrogéologie, l’imagerie sismique, le calage d’historique de production ou encore l’optimisation de forme. Dans cette thèse, on s’intéresse à une application nouvelle : la production par récupération in situ (ISR), notamment de l’uranium, qui consiste à dissoudre un métal directement dans le gisement et à le récupérer par pompage via un réseau de puits injecteurs-producteurs. La modélisation par transport réactif un outil de premier plan pour l’ISR. Elle permet de reproduire l’écoulement des fluides ainsi que les réactions chimiques eau-roche dans un réservoir exploité, et ainsi de prédire les performances de production d’un gisement. Il existe néanmoins de forts écarts entre modélisations et observations de terrains, notamment à l’échelle des puits producteurs. Outre les paramètres hydrodynamiques classiques tels que la porosité et la conductivité hydraulique, ces écarts sont imputés principalement à des erreurs sur l’estimation initiale des teneurs minérales, notamment pour les minéraux porteurs d’uranium ou consommateurs de réactif. Dans ce cadre, la méthode de l’état adjoint est mise en œuvre dans un code de transport réactif, HYTEC. Cet opérateur couplé et complexe consiste en de nombreuses équations aux dérivées partielles et algébro-différentielles couplées par une approche itérative séquentielle (SIA). Par construction, la solution du problème adjoint nécessite une structure SIA correspondante, c’est-à-dire un couplage similaire entre de nombreuses équations aux dérivées partielles et algébro-différentielles adjointe. L’effet de la discrétisation spatiale et temporelle est étudié et montre que l’approche « discrétiser puis différencier » doit être utilisée pour obtenir un gradient correct, L’approche développée est associée à des techniques de régularisation et illustrée sur des études de cas synthétiques ISR. Une méthodologie pour le choix du paramètre de régularisation est proposée, ainsi qu’une alternative ou l’étape éventuelle de modélisation statique du paramètre recherché est intégrée au problème inverse par une combinaison de l’état adjoint, de l’approche SPDE ou tout autre opérateur dérivable, et de la méthode des déformations graduelles. Cette alternative permet de réduire l’espace latent des valeurs optimisées à une centaine de valeurs, de respecter les données de puits et leurs incertitudes, et d’être toujours cohérent avec le géomodelleur. Par exemple, la géométrie des rolls-fronts uranifères peut également être imposée ou préservée. La méthodologie permet de mettre à jour les teneurs initiales en uranium de manière satisfaisante (écarts de ressources à l’échelle de la cellule de production de l’ordre de 15% après inversion) et ce même pour des historiques courts de l’ordre de quelques semaines. La prédictivité des modèles à l’échelle du puits est largement améliorée y compris sur le long terme (> 2ans). La comparaison sur des exemples synthétiques à plusieurs approches stochastiques sans dérivée de pointe telles que PCGA, ESMDA et SIES montre des écarts aux modèles de référence et aux données de production après inversion au moins similaires sinon plus faibles pour un coût de calcul jusqu’à un ordre de grandeur plus faible.

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